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Duncan Browne, un secret bien gardé

Ce chanteur, auteur et compositeur anglais est surtout connu pour “Give Me Take You”, chef-d’œuvre pop et baroque de 1968. L’anthologie “Planet Earth – The Transatlantic Years 1976-1979” réunit ses deux albums solo et l’unique album du groupe éphémère qu’il avait formé avec Peter Godwin, Metro. À (re)découvrir d’urgence.

Please welcome Duncan Browne et Peter Goodwin, aka Metro...

Please welcome Duncan Browne et Peter Goodwin, aka Metro…

Il n’avait pourtant guère affolé les radars en son temps – au même titre, d’ailleurs, que “Five Leaves Left” de Nick Drake –, mais depuis que “Give Me Take You” est devenu un disque culte grâce à sa première réédition en CD, en 2000, il cache un peu la forêt luxuriante des trois projets pop que le regretté Duncan Browne mena à bien dans la deuxième moitié des années 1970. Metro d’abord, opus pop pastel et sophistiqué étrangement passé inaperçu en 1976 (et ça ne s’est pas arrangé depuis). Seul David Bowie, homme de goût s’il en est, en avait remarqué toutes les qualités. Songwriting à quatre mains (Browne et Peter Godwin), voire à six quand l’excellent guitariste Sean Lyons contribue aussi à l’écriture. Richesse mélodique et harmonique, voix chic et mélancolique (quelque part entre Gerry Rafferty et David Sylvian), spleen on ne peut plus anglais réhaussé par une touche arty. Si on vous parle de feu le Thin White Duke, c’est parce qu’il avait jeté son dévolu sur la chanson qui ouvre l’album, Criminal World, qu’il reprendra en 1983 à sa manière, nettement moins convaincante – sorry David… – dans l’album de son carton planétaire, “Let’s Dance”. Criminal World n’est pas la seule perle de “Metro”. Precious, précieuse comme il faut, et Black Lace Shoulder, rêveuse et subtilement hispanisante, ou encore Paris, au refrain lumineux et accrocheur, mettent en valeur les talents de multi-instrumentistes du duo Browne-Godwin (guitares, piano, Moog, percussions, talk box…), sans parler de ceux de leurs musiciens invités : le violoniste Graham Preskett et la fantastique section rythmique composée du bassiste John Giblin et du fameux batteur Simon Phillips (dix-neuf ans à l’époque), qui a rarement aussi bien joué sur un disque pop – cf. ses ses roulements félins et dansants dans Black Lace Shoulder.

Ne vous laissez surtout pas décourager par le côté très “Barry Manilow” de la pochette de “The Wild Places” !

Ne vous laissez surtout pas décourager par le côté très “Barry Manilow” de la pochette de “The Wild Places” !

Metro enregistrera deux autres albums, “New Love” en 1979 et “Future Imperfect” en 1980, mais sans Duncan Browne, parti voguer solo. Suivons-le donc, puisque dans “Planet Earth – The Transatlantic Years 1976-1979”, le label Sanctuary Records a eu l’excellente idée de coupler le disque de Metro avec ses deux albums solos, “The Wild Places” (1978) et “Streets Of Fire” (1979), qui se situent, ô joie, dans la lignée de Metro. Pour l’un comme pour l’autre, Duncan Browne s’était entouré du saxophoniste Dick Morrissey, de sa section rythmique cinq étoiles, John Giblin et Simon Phillips, mais aussi de l’éclectique claviériste Tony Hymas. (Phillips et Hymas se retrouveront ensuite aux côtés de Jeff Beck dans “There And Back”, puis au sein du trio pop Ph.D : Little Suzie On The Up et I Won’t Let You Down, ça vous dit quelque chose, non ?)
BROWNE Pochette Planet EarthAinsi, entre deux chansons au format pop, Browne s’autorise quelques superbes envolées instrumentales entre prog et fusion (Camino Real Parts 1, 2 & 3 et Streets Of Fire). Mais la qualité du songwriting reste élevée : dans la lignée de Black Lace Shoulder, Nina Morena ne peut laisser indifférent. Idem pour American Hearbeat (avec ce petit goût proto-King Crimson eighties revisité Roxy Music…), The Wild Places (et sa superbe montée finale), Roman Vecu (la basse de Giblin s’enroule autour de la voix de Browne), l’étonnant Things To Come, et enfin Fauvette, qui sonne de manière troublante comme Sultans Of Swing de Dire Straits – en mieux ? Détail amusant : l’une des outakkes de “Streets Of Fire”, ajoutée en bonus track dans cette anthologie, s’intitule China Girl. Le beau David avait-il encore fait ses courses ?! Non, la seule chose que partagent les filles chinoises des deux D.B., c’est leur titre… Spécial bonus dans celle de Browne : John Giblin sonne comme Jaco Pastorius. Superbe. •

CD Duncan Browne Featuring Metro : “Planet Earth – The Transatlantic Years 1976-1979” (Sanctuary Records / Cherry Red)