Spike Lee et Michael Jackson, another brick off the wall

Le 26 février, une nouvelle version d“Off The Wall” de Michael Jackson fera son apparition dans les bacs. Elle sera couplée avec le documentaire de Spike Lee, Michael Jackson’s Journey From Motown To Off The Wall. Muziq.fr était à l’avant-première parisienne.

J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle.
La mauvaise, c’est que vous allez être obligé d’acheter encore une fois “Off The Wall”, car Michael Jackson’s Journey From Motown To Off The Wall ne sera pas disponible autrement qu’en dvd (ou blu-ray) bonus du chef-d’œuvre qui, trois ans avant “Thriller”, fit découvrir Michael Jackson à toute une génération (la mienne pour ne pas la nommer) de petits frenchies qui, côté Grande Musique Noire Américaine, juraient principalement par Stevie Wonder et Earth, Wind & Fire – franchement, vous croyez qu’à 14 ans on écoutait déjà en boucle Parliament, Sly & The Family Stone, Miles Davis ou John Coltrane ? Vous nous surestimez… (Rassurez-vous, nous avons rattrapé notre retard, même s’il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir.)

La bonne nouvelle, la très bonne nouvelle même, c’est que le documentaire de Spike Lee va vous propulser direct sur le dance floor – qu’il se situe dans une boîte de nuit branchée ou dans un coin secret de votre cerveau, peu importe : vous allez danser. (Ce qui, j’en conviens, ne facilite pas toujours la lecture des sous-titres.) De facture somme toute très classique, un rien (trop ?) hagiographique, Michael Jackson’s Journey From Motown To Off The Wall donne furieusement envie de réécouter en boucle le 33-tours épique publié par Epic début août 1979 (Ahmir Thompson s’en souvient comme si c’était hier, il se la raconte un peu parce qu’il n’avait que 8 ans, mais on veut bien croire qu’un gamin noir de Philadelphie voyait en Michael J. un nouveau super-héros à idolâtrer).

Vous allez me dire : « Pas besoin d’un doc, aussi bon soit-il, pour me donner envie de relever mon pantalon histoire de montrer mes chaussettes blanches satinées au reste du monde. “Off The Wall” est en rotation lourde depuis des lustres sur tous mes supports : chaîne hi-fi, Walkman™, Discman”, iPod™… » C’est fou ça : nous aussi ! N’empêche : il faut absolument voir Michael Jackson’s Journey From Motown To Off The Wall. Même si vous croyez connaître par cœur “Off The Wall”.
Ce doc signé Spike n’apprendra pas forcément grand-chose à ceux qui lisent toutes sortes de livres en anglais consacrés à la musique noire – quoique –, mais il groove d’un bout à l’autre, et semble calqué sur le(s) rythme(s) frénétique(s) d’un des disques les plus fascinants (et intemporels) de l’histoire de la musique populaire. Et pas seulement parce que chaque titre, dans la seconde partie du doc, est passé en revue à coup d’anecdotes.
Il sont venus ils sont tous là, ou presque : à travers des interviews réalisées spécialement et de nombreux documents d’archives, Quincy Jones, Rosie Perez (touchante), Jonathan Moffett, Kobe Bryant (passionnant, qui avoue l’énorme influence que MJ a eu sur lui), David Byrne, Jackie et Marlon Jackson (impayables), John Legend, Pharrell Williams (mystique), Bobby Colomby (directeur artistique chez Epic dans les années 1970, ex-batteur de Blood, Sweat & Tears et découvreur de Jaco Pastorius), Esperanza Spalding, Greg Phillinganes (précis-pointu), Bruce Swedien, Stevie Wonder (merveilleux) et Verdine White – entre autres –, racontent, jouent et surjouent (parfois) toutes les émotions que procurent la musique magique de Michael J.
Quant aux extraits de concerts contemporains de la sortie d’“Off The Wall”, ils sont tous simplement hallucinants. Comment ne pas avoir les yeux rivés sur ce jeune homme hors du commun qui avait écrit noir sur blanc qu’il voulait être un artiste total, le plus grand de sa génération ? (Vers le milieu du doc, la lecture d’une lettre en forme de manifeste laisse pantois.) Comment ne pas ressentir des frissons en le voyant danser comme un dieu ? Comment ne pas aimer Michael Jackson ?

Restent quelques questions : Michael Jackson a-t-il vu le vrai Dark Vador au Studio 54 ? Et qui pleurait-il dans She’s Out My Life ? L’une de ses jeunes conquêtes ou, comme le suggère l’un des témoins, Ben le rat ? Hé oui, on danse beaucouo en regardant Michael Jackson’s Journey From Motown To Off The Wall, mais on rit aussi. Merci Spike Lee. Vous aviez changé notre vision du Peuple du Blues à la fin des années 1980 avec Do The Right Thing ; vingt-sept ans plus tard, vous nous confortez dans notre amour de Great Black Music et de l’un de ses plus fascinants rejetons. Un doc sur Prince, c’est quand vous voulez – ok, en 1979, il se baladait tout nu sur une licorne mais, cinq ans plus tard, il a lui aussi rêvé et réalisé un album qui a fait bouger quelques lignes, non ?

PS : Dans le bref extrait d’une émission télévisée, on voit Louis Johnson jouer quelques mesures de la phénoménale ligne de basse de Get On The Floor. Plus électrisant, j’ai beau chercher, je ne vois pas…

CD / DVD ou CD / BLU-RAY “Off The Wall” (Epic / Sony Music)