Une autobiographie sans fard, Not Dead Yet, une interview dans le prochain Muziq (en librairie le 24 novembre), une compilation de tous ses tubes (“The Singles”), cinq Bercy déjà blindés : à peine revenu aux affaires, Phil Collins est plus jamais in the air tonight.
« Aucune femme ne peut aimer un homme qui écoute Phil Collins », dit l’un des personnages du film de John Carney, Sing Street. Ce n’est pas très gentil, et c’est surtout faux. Vous ne pouvez pas imaginer le nombre de fois où votre Doc a glissé Against All Odds ou In The Air Tonight dans ses mixtapes spéciales copines – des vraies mixtapes hein, sur cassettes Sony BHF 90 vertes.
La critique rock a toujours adoré détester Phil Collins. Rien ne trouve grâce à ses oreilles et ses yeux. Ni son look – gentleman farmer à casquette, costume chic et basket, plombier-zingueur en goguette, tout est à jeter ! –, ni ses vidéoclips, ringards, ni son atroce son de batterie gonflé aux hormones, ni ses power ballads pour radio FM, encore moins son passé de prog-rocker (Genesis, la honte !), ou pire, de jazz-rocker (Brand X, n’importe quoi !), et plus que tout son insupportable polyvalence : de John Martyn à Peter Gabriel (le vrai, celui d’après Genesis) en passant par Robert Plant et Brian Eno, il a osé faire twister ses baguettes partout – mais de quoi j’me mêle ?! [Phil, si tu nous lis, tout ceci est du french humour au troisième degré, of course, NDR.]
Bref, si Phil Collins n’avait pas existé, d’aucuns ne l’auraient certainement pas inventé. Seulement voilà, et ne leur en déplaise, ce polisson de 66 ans sévit dans le monde musical depuis cinquante ans, et ce jeune batteur super-bosseur élevé en pleine ère du swingin’, bluesin’ and rockin’ London des glorieuses années 1965-1965 a su dépasser sa fonction de “simple” tambourineur éclectique pour se réinventer au tournant des années 1990 singer songwriter pop à succès – que dis-je, à ÉNORME succès.
Dans Not Dead Yet, Phil Collins se raconte avec une modestie et, plus encore, un sens de l’humour doublé d’une auto-dérision so british. Il s’émerveille à tout instant de son incroyable réussite, et mêle astucieusement sa vie intime – pipi au lit, chien possédé, alcool et femmes divorcées au programme… – à ses nombreux souvenirs musicaux, qui laissent souvent rêveur, de ses débuts avec Flaming Youth à sa participation (coupée au montage) au film des Beatles A Hard Day’s Night en passant par le « naufrage » du Live Aid (ou plus précisément la débâcle de la “reformation” de Led Zeppelin, featuring Phil en “cobatteur” avec Tony Thompson), sa séance comme dans un rêve avec George Harrison (il a joué des percussions sur Art Of Dying mais c’est une autre version qui a finalement été retenue dans le triple album “All Things Must Pass”), la saga Genesis, la génèse de In The Air Tonight, son admiration pour Ringo Starr, Buddy Rich, Sonny Payne, John Bonham, sa passion pour la Motown, etc. etc. Bref, cette autobio très bien écrite se lit avec gourmandise.
En guise de BO de nombreux chapitres de ce livre, le triple CD “The Singles” fera parfaitement l’affaire. Rappelons aussi que Mister Collins a récemment réédité tous ses albums en version Deluxe, et réécoutons au passage le “3” de Peter Gabriel, “Pictures At Eleven” de Robert Plant, “Another Green World” de Brian Eno, “Morrocan Roll” de Brand X, « Grace & Danger” de John Martyn… (Liste non-exhaustive.) •
Livre Not Dead Yet, l’autobiographie (éd. Michel Lafon, 430 pages, 20,95 €)
CD/LP “The Singles” (Atlantic / Warner Music)