Muziq, le site qui aime les mêmes musiques que vous
Nouveautés

“The Tipping Point” de Tears For Fears : le grand retour

Cover

Dix-sept ans depuis leur dernier album en date ! Cela valait-il le coup d’atttendre aussi longtemps ? Après avoir passé au crible chaque chanson de “The Tipping Point”, Julien Ferté a répondu oui. Un oui franc et massif.

Il faut se méfier des premières écoutes, qui ne révèlent qu’en partie le plaisir, durable ou non, qu’on prendra vraiment à écouter un album – un quoi ? Mais si, vous savez bien, un album, ce recueil de chansons avec une pochette, susceptible de vous faire vibrer d’un bout à l’autre, qui vous raconte une histoire au long cours, reflète sous tous ses angles la personnalité d’un.e artiste ou d’un groupe. À muziq.fr, on adore picorer sur les plateformes de streaming, mais on reste attaché au concept, à l’idée même d’album.
Le nouvel album de Tears For Fears, on l’attendait depuis 2005, en se disant au fil du temps qui passe que le remarquable “Everybody Loves A Happy Ending” de 2005 finirait par bien porter son nom. Mais non. Roland Orzabal et Curt Smith, le duo insécable qui joue depuis des lustres à se séparer pour mieux se retrouver (et inversement) revient aux affaires avec l’inespéré “The Tipping Point”. Inespéré et, surtout, splendide. La preuve par dix + une (Secret Location, la bonus track finale).

No Small Thing, The Tipping Point et Break The Man
Ces trois-là, respectivement placées en première, deuxième et quatrième position dans l’album, on imagine que vous les connaissez déjà puisque ce sont les trois singles digitaux déjà mis en ligne sur les Spotify et autres Deezer.
A propos de No Small Thing, Roland Orzabal dit, non sans humour, que Curt et lui avaient essayé de faire du « speed dating » avec de nombreux songwriters et producteurs. Résultat : tout le monde voulait réfaire la génèse, écrire le nouveau Shout ou le nouveau Sowing The Seeds Of Love. Ils se sont donc assis tranquillement face à face, ont empoigné des guitares acoustiques, commencé à improviser spontanément un truc « à la Dylan », qui progresse en spirales orchestrales, porté par une batterie « Led Zeppelin’ish » (dixit Orzabal) pour finr en un époustouflant chaos contrôlé. Grand moment.
La chanson titre, coécrite par Orzabal avec Charlton Pettus, nous renvoie cependant au temps des splendeurs eighties via ce groove shuffle hérité d’Everybody Wants To Rule The World et ces volutes crépitantes de synthétiseur. Paroles envoûtantes et sombres, inspirées par la première femme, mourante, d’Orzabal (« Life is cruel / Life is tough / Life is crazy then it all turns to dust / So who’s that ghost knocking at my dorr ? » : brrr…). Encore un grand moment.
L’intro de Break The Man, coécrite cette fois par Smith et Charlton Pettus, est une chanson-manifeste dédiée au pouvoir de la femme. Son refrain – oui, ce vieux truc qui se faire trop rare – est plutôt irrésistible. Smith : « Je ne voudrais pas sonner comme un vieux hippie, mais si on pouvait trouver plus d’équilibre entre les hommes et les femmes, on aurait plus d’harmonie. » Bien noté Curt. Troisième grande réussite.

Long, Long, Long Time
Signée Orzabal, Smith et Pettus, Long Long, Long Time et son presque déconcertant rythme changeant (sur le refrain) trouve peu à peu sa voix entre nos tympans grâce, notamment, à la voix prégnante de Carina Round, et ces harmonie polychromes. Mélodique à souhait et, in fine, entêtant.

My Demons
Quels démons ? Ceux, soniques, des eighties ! Le songwriter et multi-instrumentiste Sacha Skarbek (remember le violon sur 7 Seconds de Youssou N’Dour et Neneh Cherry ? C’était lui) et le programmateur allemand Florian Reutter ont proposé le backing track, Orzabal a adoré, et hop, le tour était joué. Punchy et piquante, My Demons est une très bonne chanson.

HyperFocal: 0

Rivers Of Mercy
Grande chanson, peut-être la meilleure de l’album. La préféré d’Orzabal en tout cas. Qui aurait eu sa place dans “The Seeds Of Love”. Intense, spirituelle et masjestueuse, Rivers Of Mercy est encore une création collective , écrite par Orzabal, Pettus et Doug Petty (au piano). Sertie de chœurs, cette ballade au long cours (plus de six minutes) nous rappelle que Tears For Fears est vraiment un groupe unique.

Please Be Happy
Touchante ballade piano centrée et baignée de cordes, cocomposée avec Sacha Skarbek.

Master Plan
D’aucuns, comme souvent depuis “The Seeds Of Love”, jureront croiser le fantôme de John Lennon. C’est ce qui fait la force de cette chanson hyper émotionnelle signée Orzabal, portée par le drumming impeccable d’Aaron Sterling. Du TFF pur jus.

End Of Night
« Certainement la chanson la plus accrocheuse, rythmée et directe de l’album » selon son auteur, Orzabal ; traversée par des licks de synthé comme on les aime, sertie une fois de plus d’un refrain “à l’ancienne”. Très chouette partie de guitare twang en prime.

Stay
Comme son titre ne l’indique pas, Stay a été écrite par Curt Smith au moment « songeait à quitter Tears For Fears une nouvelle fois ». (« Surprise, surprise. c’est l’événement annuel ! », répond Orzabal.) Le refrain est plus explicite : « Stay, don’t stay / Go, don’t go. » Ok. Belle conclusion douce amère en tout cas. Suivie par la bonus track Secret Location, qui est tout simplement l’un des bijoux de l’album, aussi lumineuse qu’une pépite pop West Coast des années 1980.

CD Tears For Fears “The Tipping Point” (Concord Records / Universal, dans les bacs le 25/2).